• Qu'est ce que la Chevalerie ?

     

    Il est difficile de donner une définition exacte de la Chevalerie tant elle est imprégnée de plusieurs courants. Il est à retenir cependant, que la Chevalerie, telle que nous la connaissons, trouve ses racines profondes dans la Chevalerie Arabe qui devance de 600 ans la Chevalerie Occidentale. L'un de ces chevaliers arabes était proche de Saladin, lui-même proche des Templiers, et lors de l'adoubement, les Chevaliers Arabes buvaient un breuvage dans une coupe mystérieuse.....

    Nombreux furent les contacts entre les Chevaliers Sarrasins et les Chevaliers d'Occident. Durant les croisades, tandis que le menu fretin de la troupe se battait et s'entre-égorgeait, les Califes initiaient les Seigneurs à la Science qu'ils avaient acquise et dont ils étaient les dépositaires. Les temps étant enfin venus, il fallait que cette Connaissance vienne en Europe. Souvenons-nous du raffinement de la civilisation arabe à cette époque, et de la rudesse de nos ancêtres. Sur le plan exotérique, les croisades avaient pour but de sauver le tombeau du Christ aux mains des barbares. Mais si nous nous penchons sur le côté ésotérique de la chose, nous comprenons que ces expéditions avaient pour seule mission de pénétrer dans les dédales de la Science Occulte. Ce n'est pas sans raison que la période de notre histoire qui succède au Moyen-âge est la Renaissance.

    Pour aujourd'hui, nous nous arrêterons à la Chevalerie du Moyen-âge. Nous constatons qu'elle est une institution féodale de Chevaliers avec des idéaux qui lui sont associés. On distingue deux types de Chevaliers: le noble Chevalier combattant à cheval, et le paysan, soldat d'infanterie, fantassin ou artilleur.

    Composée donc à la fois de guerriers, de Chevaliers paysans, les Chevaliers sont bien souvent issus d'anciennes familles nobles: ils en sont les cadets célibataires et sans héritage, voire les bâtards. Si pour certains la Chevalerie a été un ascenseur social au début du XIIIème siècle, des législations royales de France, d'Allemagne et d'autres royaumes moindres stipulent que l'on ne peut accéder à l'honneur chevaleresque que si l'on est soi-même de lignée chevaleresque. Mais quelles que soient les origines sociales du Chevalier, cela a un coût économique important, et l'équipement de base (cheval, heaume, haubert, épée) demande un investissement considérable.

    La Chevalerie a ses codes et ses coutumes, notamment par la cérémonie d'adoubement où le postulant prête serment, une main sur l'Evangile. A haute et intelligible voix, devant ses pairs, il déclare s'engager à:

    1. Croire à tous les enseignements de l'Eglise et observer ses commandements;
    2. Protéger l'Eglise;
    3. Défendre tous les faibles;
    4. Aimer le pays où il est né;
    5. Ne pas fuir devant l'ennemi;
    6. Combattre les infidèles avec acharnement;
    7. Remplir ses devoirs féodaux à condition qu'ils ne soient pas contraires à la loi divine;
    8. Ne mentir jamais et être fidèle à sa parole;
    9. Etre libéral et généreux;
    10. Etre toujours le champion du droit et du bien contre l'injustice et le mal.

    S'il manque à son serment, il est proclamé indigne d'être Chevalier. Conduit sur une estrade, son épée est brisée et piétinée, son blason est attaché à un cheval et trainé dans la boue. Tous peuvent l'injurier. On le met sur une civière, puis on le recouvre d'un drap noir et on le porte à l'Eglise comme un mort. On récite les prières des défunts: il est mort comme Chevalier et banni toute sa vie.

    Les vertus traditionnelles de la Chevalerie sont donc de nobles sentiments: la piété, l'humilité, la charité, la bravoure, la courtoise, la foi ou l'honneur. Toutes nos valeurs christiques et martinistes !

    Ecole de vertus, la Chevalerie oblige le Chevalier à des devoirs:

    Envers sa dame: la courtoisie est d'abord l'ensemble des qualités du noble, le comportement élégant d'un Chevalier; puis vers 1150, la courtoisie se change d'une dimension amoureuse, incarnée dans le personnage de Lancelot. L'amour courtois est chanté par les troubadours et les trouvères;

    Au service de l'Eglise: le Chevalier doit mettre son épée au service du pape (croisades) et des faibles: il devient alors Chevalier du Christ (Miles Christi).

    Les qualités du Chevalier idéal sont la sagesse, la prouesse, la générosité et la fidélité. Sa tenue même, dès qu'il la revêt, lui rappelle son sacerdoce et ses engagements:

    • le heaume (casque): l'espérance, l'intelligence, la pudeur;
    • la cuirasse: la prudence, la piété, la protection contre le vice et l'erreur;
    • les gantelets: la justice, la science, le discernement et l'honneur;
    • l'épée, forgée durant plusieurs semaines par un forgeron du château: la force, la puissance et le sacrifice, la destruction du Mal, de l'injustice et de l'ignorance, la constructrice quand elle maintient la paix de Dieu et repartit la justice - le lien du Ciel et de la Terre;
    • l'écu (bouclier): la foi, le conseil, la protection contre l'orgueil, la débauche et l'hérésie;
    • la lance: la charité, la sagesse, la droite vérité.

    A l'évocation historique et rituelle de ce qu'est la Chevalerie, nous voyons combien il est facile de la rattacher à notre démarche mystique et spirituelle telle que nous la vivons au sein de notre Martinisme en général, et de notre « Grand Prieuré Martiniste-Martinéziste International » en particulier. Elle y a en effet sa place, en raison des hauts idéaux qu'elle défend, qu'elle véhicule et dont elle se fait l'écho, et comme toute démarche spirituelle, elle requiert une motivation profonde et répond à un appel vers la perfection et vers Dieu.

    De plus, n'oublions pas que le Martinisme est une Chevalerie Chrétienne. Dans notre cheminement, nous pouvons reprendre point par point, en les adaptant à notre époque, les enseignements chevaleresques tels que les vivaient les preux chevaliers, francs défenseurs de la chrétienté et des plus faibles, de l'honneur, des valeurs morales, de la parole donnée. A l'énumération des ces qualités, nous trouvons là ce qui est la base même de nos enseignements et de nos rituels, lorsque nous recevons nos degrés et grades respectifs.

    Mais comment donc adapter la Chevalerie à notre quête mystique ? Certes, nous ne nous promenons plus en armure pesante sur un cheval qu'il faut maîtriser, avec un heaume et une lourde épée difficile à manier.

    Et pourtant, ne devons-nous pas faire preuve de maîtrise de nous-mêmes en premier lieu, car il s'agit bien là d'une vertu cardinale dont doivent faire preuve le Chevalier et l'Adepte pour dompter la bête qui sommeille en eux ?

    Dès lors que nous embrassons la voie Martiniste, ne sommes-nous pas déjà des Chevaliers, pour devenir des Soldats du Ciel, comme se plait à nous le rappeler Monsieur Philippe ? Ne devons-nous pas nous battre en premier lieu contre nous-mêmes pour nous délester de notre égo et nous mettre ainsi en harmonie avec les lois du Ciel ?

    Le Chevalier vit dans deux mondes: sur la Terre et pour le Ciel. Il mène un double combat: sur la terre et dans le Ciel. De son épée, il doit terrasser le Mal, le dragon comme Saint Michel Archange. De par son épée, il doit maintenir la Paix de Dieu et apporter la justice. Il se veut le garant de la Vérité, de la parole droite, noble, de l'engagement pris, du serment donné.

    Pour le Chevalier, l'épée était considérée comme une arme sacrée et mystique. Elle était le symbole de l'honneur et de la distinction. On jurait sur la croix de son épée comme on jure sur la Bible aujourd'hui. Emblème principal de sa qualité, elle symbolise sa bravoure et son courage. Il en fait l'arme du logos, du verbe de Lumière qui combat les ténèbres. Elle manifeste sa volonté pour dissoudre le Mal. Dans notre Ordre, c'est par l'Épée que l'Initiateur « créé », « reçoit » et » constitue » un Martiniste, héritier de l'ancien adoubement chevaleresque.

    Son heaume lui rappelle les vertus d'intelligence et de pudeur. Lorsque celui-ci est fermé, cachant son visage à la foule, nous retrouvons là la même fonction que celle du Masque martiniste: cacher sa personnalité mondaine pour être un Inconnu parmi d'autres Inconnus; savoir être un Inconnu pour ceux tirés de l'ignorance qui les enlise; savoir sacrifier sa personnalité toutes les fois que l'on agit, pour ne révéler que la Gloire de Dieu et n'agir qu'en son nom.

    Sa cuirasse le protège avant tout contre le vice et l'erreur. De quoi nous protège notre Manteau martiniste ? Ne représente-t-il pas ce qui isole le Sage des courants instinctifs ? Avec la pleine et entière possession de soi-même, il figure la Prudence et la Discrétion. Enveloppé dans son Manteau, le Martiniste devient insensible aux attaques des auxiliaires de la Force Inconsciente Inférieure.

    Le Manteau, ne nous rappelle t-il pas aussi le partage, celui de Saint Martin de Tours ? A l'aide de son épée (nous retrouvons là encore l'épée du chevalier) il se sépare de la moitié du manteau lui appartenant pour protéger un pauvre hère des morsures du froid hivernal de Picardie.

    Le bouclier symbolise sa foi, la protection contre l'orgueil. La lance, quant à elle, lui rappelle à chaque instant la sagesse, la droite vérité et la charité. A l'énoncé de cette dernière vertu, on peut donc penser que c'est par pure charité que ce soldat romain a donné un coup de lance dans le flanc du Christ au moment de sa Passion. Vu sous cet angle, ce geste prend donc une dimension charitable de compassion pour la douleur de notre Seigneur afin d'abréger ses souffrances.

    Par nos prières, en implorant le Père, en passant par le Fils, ne cherchons-nous pas à livrer une guerre sans merci contre la douleur et l'iniquité, afin de bâtir un monde de paix, de compréhension et de compassion pour aider nos semblables en difficultés ?

    Nous trouvons pléthore d'ouvrages sur la Chevalerie qui traitent des exploits de ces hommes courageux. Outre cet esprit de galanterie qui les caractérise et qu'ont chanté trouvères et troubadours, nous retiendrons la valeur de leurs engagements à la gloire de Dieu et de leur patrie. Entrer en Chevalerie requiert le désir d'aller vers de hauts idéaux, de les appliquer dans son quotidien dans le secret de son cœur, avec sincérité, passion et pureté. Car la véritable Chevalerie est un art royal, basé sur un code d‘honneur qui allie le sens aigu de la justice et du devoir à une puissante voie mystique. Certes, les temps ont évolué et nous ne pouvons pas revêtir notre côte de maille et parcourir la campagne pour rassembler sous notre étendard. Nous pouvons cependant, dans le Silence, montrer un certain exemple de notre quête. Car un Chevalier du Graal, ne fut-il qu'un Écuyer-Novice dans un premier temps, est un Chevalier de Dieu. Il œuvre dans le silence. Sa religion n'est pas terrestre. Nul Eglise ne prêche sa croyance. Sa foi ne lui vient pas des hommes, mais de la grâce céleste dont son Ame est le messager. Il se met au service de Dieu. Il ne combat plus avec l'épée comme le faisaient les Chevaliers d'autrefois, mais il utilise les armes virtuelles que sont la prière, l'obéissance aux commandements du Ciel, la charité, la compassion et l'amour du prochain.

    Non nobis, Domine,

    Non nobis,

    Sed nomini Tuo da Gloriam !





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